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Ce SRAS a faim
22 novembre 2005

La révolte d'un style, celui des 60's

              La « Beat Generation », cette génération qui étouffe entre guerre froide, maccarthysme et codes moraux a de grands noms attachés à son destin ; Kerouac, Burroughs, ou Ginsberg ont raconté contre l'immobilisme bourgeois des histoires d'errance et de voyage spirituel à travers l'Amérique. Le mot « beat » désignait depuis le XIXe siècle un vagabond du rail voyageant clandestinement à bord des wagons de marchandises. Peu à peu, repris par les jazzmen noirs, le terme avait fini par signifier « à bout de souffle, exténué ». À la fin des années 50, cette génération incarne un formidable espoir. Elle a déjà contaminé les campus américains. Une toute petite minorité d'étudiants fait exploser le système de l'intérieur, comme le raconte le roman très autobiographique de Richard Farina, L'avenir n'est plus ce qu'il était.

              Le livre, inspiré d'un évènement réel soit le soulèvement d'un campus contre l'interdiction pour les filles de fréquenter les chambres des éudiants, raconte le retour d'un certain Gnossos sur le campus de Lairville, l'un des plus prestigieux des États-Unis (on reconnaîtra l'université de Cornell), débordant d'une énergie à la fois créatrice et suicidaire.

         Le jeune homme multiplie conquêtes féminines, expériences droguesques et spirituelles, se réveillant toujours l'oeil morne et la bouche pâteuse comme les personnages de Big Sur.... Mais ce n'est pas uniquement un "roman de campus" comme le genre a pu émerger après ; cet étudiant protégé par l'Immunité ne met jamais les pieds dans les amphis : il est donc en marge de ce monde codifié. Ce statut exceptionnel mène le héros à sa perte qui se croit au dessus des lois, au dessus des déceptions sentimentales, toujours protégé par l'Immunité de l'existence. Le livre s'achève donc sur une triste constatation lors d'une ultime virée pathétique à Cuba, d'où l'un de ses camarades ne reviendra pas.

         Ce livre, passionnant, fascinant, singulier, est resté inédit en France jusqu'à aujourd'hui. Et on est frappé par la même sincérité de ton et de profusion verbale, de dialogues décalés qui unissent les frères Egolf et Farinia. Une génération d'écart entre eux et pourtant une même rage et l'énergie sans limite, sans complaisance de la jeunesse comme horizon.

         Pour signaler l'importance du personnage, on rappellera que Richard Farina a été une figure de la musique folk américaine du début des années 60. Proche de Bob Dylan, il a lui aussi poussé les murs, dérangé les nappes et laissé un bordel monstrueux derrière lui. Ce n'était pas du militantisme mais un façon d'être comme ce sourire qui semble dire au monde à quel point il en est détaché, qu'il affiche insolemment sur la couverture où il est adosé à un chambranle de porte à côté de Mimi Baez (la soeur de Joan Baez). Farinia à l'inverse de Gnossos était promis à un bel avenir à New York, malheureusement Richard Farina n'a pas eu le temps de devenir célèbre. En avril 1966, il meurt le jour de la publication de son livre. Grâce à lui des gens comme Mark Kurlansky pourront vivre et écrire à sa place  : "1968, l'année qui ébranla le monde."

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Commentaires
M
oui, il est vrai que pour une fois j'ai le temps de lire autre chose que des auteurs classiques lus pour la millième fois par des yeux laborieux, c'est pourquoi je consacre dans mon blog un coin réservé à mes lectures. Qui disait "je hais les voyages"? Un homme qui avait compris qu'être déraciné de ses repères c'était courir le risque de l'ennui et de l'attente permanente de l'action. Car épuisons les clichés du voyage comme une aventure extraordinaire, nous ne devrions d'ailleurs plus avoir à revenir sur cela depuis notre lecture de Céline. Je rencontre les mêmes âmes que Bardamu, des représentants de l'état français perdus dans les vapeurs de l'alcool, et consummés par le climat extrême qui règne ici. <br /> La langue est un mystère magnifique et très irritant à la fois : je me laisse trop entrainer par la mélodie sans accorder d'importance à des conversations banales. Je ne veux pas savoir ce qu'il se dit de si commun sous ces signes si mystiques.<br /> <br /> la prochaine critique sera pour la semaine prochaine, là je vais me concentrer sur l'imagerie et les textes descriptifs, il faut continuer la fresque et qu'elle prenne vie<br /> <br /> Pasatelo bien !
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